Histoire du temps jadis... 3

[Mondlin]

Allez, une dernière...
Ben oui, paske après j'vais vous gonfler à jouer les anciens combattants.

Celle-là, c'est l'histoire de ma seule et unique Ducati.
Faut dire...


Après une anglaise, puis une allemande, Mondlin s'était acheté une italienne...

Mondlin il aimait pô les japonaises. C'était trop neuf, trop nouveau, trop propre, trop brillant.
(Trop cher ?)
Y'avait trop de chromes, c'était… clinquant.
Beurk, c'étaient des bécanes de minets !

C'était un vendredi soir, début 1971…

Comme d'hab, on était en train de glander "chez Garde" not' troquet favori.
Là ousqu'on passait des heures et des heures devant l'unique café noir que nos moyens nous permettaient…
C'était une soirée fraîche et humide. En gros un temps de merde !
Avec des nuages bas et un ciel plombé.
Il avait pas plu, il faisait juste moche mais c'était resté sec.

Les vendredis soirs, quand on avait rien d'autre à foutre, c'était là qu'on passait notre temps à s'envoyer des vannes sur nos bécanes respectives.
C'était là aussi que se décidait, souvent à la dernière minute, les sorties en concentres, ou plus modestement les virées sur Paris…
On allait à la Bastille, ou pour nous, plutôt au "Vizir"... Le Vizir, c'était un café tout en bas du boulevard Sébastopol, à quelques dizaines de mètres de la rue Saint Denis, où se retrouvaient tout un tas de graisseux qu'avaient rien d'autre à foutre que de passer le temps en parlant moto.

Accessoirement, c'était aussi le point de chute d'un certain nombre de "respectueuses" qui venaient faire un p'tite pause entre deux clients et qui, à l'occasion, faisaient le bonheur d'un motard en lui demandant de l'emmener faire un tour du quartier sur sa brèle plus ou moins rutilante…
Hé ! rêvez pas ! J'ai jamais eu confirmation que personne n'ait jamais été "payé" en nature.
Quoique certains aient tenté de nous faire croire !!!

Ce soir là Mondlin y voulait sortir. Et personne y voulait bouger son cul !

Mondlin, il est têtu. Quand il a une idée kek part… Alors Mondlin il a fait iéche tout le monde. Y les a traité de tarlouzes (y s'en foutaient, y z'avaient l'habitude… ) de branleurs, de feignants, de caisseux, bref de moins que rien… A force de leur prendre la tête, Mondlin il a réussi à en décider trois à aller faire une virée, au Vizir, justement…
(Voir au-dessus, pour ceux qui suivent pas).

Y'avait Bolduc avec son 125 SSA, Suzuke-la-dérive avec son T-20, et Gégé avec son 4 ½ DOHC...
Ben la Ducat elle avait soif. Alors, d'abord, passage à la pompe.
Hop ! vingt litres de super dans le beau réservoir poly de la desmo et c'est parti !

Un kilomètre et demi (environ, vous voulez quand même pas que je retourne mesurer ?) et on se pointe à l'entrée d'une sorte de patte d'oie merdique. Un truc mal foutu, avec la branche droite qui se referme, toute en dévers. Pas l'endroit qui incite à l'attaque, quoi…

Mondlin, il est en tête. A cette époque, Mondlin il était généralement en tête...
Histoire de montrer aux z'autres qui c'est qu'est l'patron, non mais des fois !!!
Avec une légère avance sur les autres, et heureusement, une vitesse en bas, et il emmanche à droite. Tranquille…

Et là… A peine sur l'angle, genre mode lopette ON de chez ON, y'a l'arrière de la Ducat qui tente un dribble et veut passer devant… Aussitôt le K81 y déclare forfait et la bécane glisse à l'équerre. L'arrière décroche et Mondlin y se couche sur la droite genre grosse merde qui se vautre !

J'étais pas à plus de 30/40 km/h mais alors à tout casser. Ca glisse un mètre à peine, avec quelques étincelles.
La pelle minable, quoi. Pas du genre de celle qui fait de toi un héros. T'as pas encore touché le sol que déjà, dans ta tête, tu cherches une bonne excuse. Parce que tu sais d'avance ce que tu vas entendre une fois que tu te seras relevé…

Et d'un seul coup, un bruit bizarre. Genre… VLAOUFFFFFF !!!

Là, Mondlin y se retrouve assis le cul par terre au milieu d'un immense feu de camp.
Des flammes j'vous raconte pas ! L'enfer genre napalm au Viet-Nam…
Me suis jamais relevé aussi vite !

Et nous v'là, plantés là comme des poireaux à regarder brûler la Ducat…
Vingt litres de pétrole, ça en fait un feu de joie ! J'aurais jamais cru que ça brûle aussi longtemps une moto. Les pin-pon y ont mis plus d'une demi heure à se pointer. Y restait plus que quelques flammèches sur le bitume qu'avait fondu… Z'auraient pu rester au lit !

Qui c'est qu'à vu brûler une moto équipée poly ?
Reste plus rien ! Ma sacoche de réservoir, disparue avec mon 6x9 Zeiss Ikon et mon mini extincteur (prémonition ?) mes clous en vrac sur la route. La selle, le réservoir, la tête de fourche en poly, évaporés ! Les pneus, consumés ! Le carbu, les caches culbus en alu, fondus ! Y'avait plus que le cadre, les jantes et les restes du moteur. Des bouts de fils, des câbles sans leurs gaines… Un squelette noirci, immonde…

Trois bornes à pied pour rentrer, en poussant ce truc qui faisait un bruit de ferraille pas possible en roulant. La honte du siècle ! Trop content qu'il soit presque minuit et que les braves gens soient quasiment tous couchés… Imagine…

Y m'a fallu longtemps pour comprendre le pourquoi de cette gamelle.
J'attaquais pas, la route était sèche, pas grasse, pas sale…
Y'avait rien dessus.

Ta moto, à priori tu l'as met pas en cause. Nan, pas LA tienne !

Et ben v'là. Ducati, c'est friable. Elle avait 15 000 bornes et j'avais quand même déjà cassé un piston (serrage et trou dedans cause carbu trop pauvre) descendu un roulement d'embiellage. Perdu quelques boulons, fendu la plaque d'immat…
Et ouiche, ça vibre un peu, un mono !

Et ben ça vibre même tellement que c'est pas une bonne idée de monter là-d'ssus un réservoir poly d'origine incertaine (mais certainement artisanale). C'est ça qu'à chié. Il s'est fendu, le poly. Juste dans, ou un poil avant, le virage. Et quand je dis fendu, il a du carrément s'ouvrir en deux, comme une figue trop mûre ! L'essence à pissé, juste devant le pneu…

C'est ça la glisse. C'est ça qui s'est enflammé à la première étincelle !
Fuck n' damned ! Après un coup pareil, Mondlin il est passé aux japonaises, et il en est jamais rev'nu ! ! !
Faut pas déconner non plus, insister plus longtemps aurait été du masochisme…

[bino]

enorme ton recit cicis, comme les deux premier

bah dis donc tu rédiges quand ton premier livre là?

[M3MOREAU]

Excellent récit, on croirait lire un Tome N+1 du Joe Bar Team. Pleure pas Mondlin, les Ducati ca n'a jamais été fiable. J'ai toujours été super surpris de la cote qu'elles ont en revanche avec les ignares piétons.

Même si tu n'es plus devant à cause de ton grand âge avancé, tu chevauches la plus puissante bécane de série actuelle. Sois en fier

[taz029]

Mince déjà fini !!! merveilleusement raconté.

Ok c'est Ducat mais c'est aussi une moto

[aldi3]

je me regale en le lisant ça me rapelle plein de situations de potes
une ambiance

[Steve Parter]

Un p'tit moment de full bonheur, des tonnes de souvenirs qui te te reviennent dans la gueule, bref ne t'rrete surtout pas de nous remémorer tes affres du temps jadis, bercés par ANGE, les STONES, les Boeux Attelés, et tout un tas d'autres qui prenaient le relais lorsqus nos mégaphones avaient enfin (ou trop vite) fini par se taire !!!!
Merci encore à toi pour ces récits tirés d'une époque antédéluvienne où nous avions encore un peu de liberté !!

[lordocto]

Terrible !!!!


J'ai tout lu en entier (si si j'ai pas triché ).


Alalala terrible ces Ducati hein ? Heuresement que sa à légérement changer


En tout cas sur le coup sa doit foutre les boules

[Titi]

Magnifique

Et superbement bien raconté

Tiens, tant que j'y pense, qui amène une Ducat pour le prochain barbecue ?

[hzkawa]

Du pur bonheur à lire ça me rappelle minot environ 11/12 piges y'a un mec qui avait un 250 desmo avec la peinture pailletée cette moto était garée dans la cour de mon immeuble p'tin ça faisait tilt dans ma tronche rien que de la voir enfin par la suite je n'ai jamais eu de Ducat

[Mondlin]

Au fait, merci les copains.
Je suis content que ça vous plaise, ces p'tits souvenirs...

[dnstouron]

Au fait, merci les copains.
Je suis content que ça vous plaise, ces p'tits souvenirs...

Merci a toi c'est du bonheur tes reçits , on en oublirait presque que c'est du vecu